Bouts rimés

Luc Etienne fut un spécialiste du genre avec quelques monuments : il s'agit d'utiliser des rimes imposées sur un sujet qui ne l'est


IMMINENCE DÉSAGRÉABLE

Sujet donné : le service militaire, sur les rimes du " sonnet des voyelles " de Rimbaud.

Ooo ! aaa ! iii ! telles sont les pleurardes
Qui libèrent en moi les tristesses
Déjà, j’entends sonner les strideurs
Qui bientôt jailliront des trompettes
 

Voyelles

latentes
éclatantes
cruelles.

     
Au signal il faudra bondir hors de la
Ramper au jour levant sur d'humides
Les yeux fermés encor sur des formes trop
Et rêvant aux seins durs des jeunes
  Tente
Ombelles
Belles
pénitentes
     
Parcourir en troupeau les campagnes
Sans réussir jamais à détendre les
Qu'impriment les soucis à mon front
  virides
rides
studieux
     
Je sais qu'il nie prendra des colères
Que, dans sa nudité trouble de mauvais
Triste, nie sourira la révolte aux doux
  étranges,
ange,
yeux.

 

LE CONQUÉRANT IMMOBILE

Sujet donné : la paix des champs, sur les rimes des " Conquérants " de Hérédia.

J'aime entre tous pays mon Neuflize
Ses maisons aux murs blancs, ni hautes ni
Qui n'ont pas vu grandir de fameux
Et semblent se moquer du noir progrès
 

natal,

hautaines,
capitaines,
brutal.

     
Après avoir peiné pour quelque vil
Je viens m'y reposer, des villes si
Dans l'herbe je m'étends. Tout un peuple
M'entoure, m'isolant du monde
  métal,
lointaines.
d'antennes
occidental.
     
Je rêve lentement de voyages
Orages périlleux, chasses sous les
Puis retour triomphal, luxe, palais
  épiques :
tropiques,
doré.
     
J’ai ramené d'or pur trois blanches
Non, mais je suis heureux, dans ce monde
Et je n'ai pas besoin, moi, d'étoiles
  caravelles
Ignoré,
nouvelles.